Commémoration des défunts
Transcription de la prédication extraite de la messe diffusée à 11 heures sur Youtube Cathédrale de Vannes
« Espère le Seigneur, sois fort et prends courage », avons-nous chanté il y a un instant avec le psalmiste.
Frères et sœurs, mes amis,
La mort n'est pas rien. Perdre un papa ou une maman, perdre ceux qui nous ont donné la vie, ceux qui nous ont élevés, ceux qui nous ont donné le meilleur d'eux-mêmes, avec leurs grâces et leurs faiblesses, n'est jamais chose aisée. Perdre son épouse, son époux, après tant et tant d'années de mariage est long à assumer, à valider, à espérer.
Et mon Dieu, perdre un enfant avant soi, devoir subir le scandale de la mort d'un enfant parfois injuste, trop rapide, trop brutal.
« Espère le Seigneur, sois fort et prends courage ». La mort n'est pas rien, mes amis.
Où sont nos morts ? Que deviennent celles et ceux qui nous ont quittés, que nous avons tant aimés et estimés ? Nous le croyons, depuis 2000 ans, il n'y a plus de Vendredi-saint sans dimanche de Pâques, il n'y a plus d'hiver sans printemps de vie, il n'y a plus de mort sans résurrection !
Nous ne croyons pas en quelque chose, frères et sœurs, nous croyons en quelqu’un, le Christ ressuscité, qui nous dit que le ciel n'est pas vide et qu'un jour nous reverrons celles et ceux que nous avons côtoyés sur cette terre.
Il est grand le mystère de la foi. Où sont nos morts ? Que deviennent celles et ceux qui nous ont quittés ?
Leur corps peut dépérir, mais l'intelligence de leur âme, nous le croyons, entre dans la paix de Dieu. Et vous savez, avec délicatesse, j'aime souvent dire, quand nous apprenons le décès de quelqu'un, et quand il est opportun de le dire ainsi : « Maintenant, elle sait … maintenant, il sait ! ».
Maintenant, elle sait qu'il n'y a pas rien ou quelque chose, mais qu'il y a quelqu'Un. Maintenant elle sait que la mort n'est pas une impasse ou un sens interdit, maintenant elle sait qu'il y a le Christ et tous les autres.
Que se passera-t-il le jour où tout basculera pour nous ? Si notre corps est promis à une certaine dégradation, l'intelligence de notre âme, tant nous sommes mystérieux, tant nous sommes uniques, tant nous sommes connus et aimés de Dieu, n'entre pas dans le néant. Il y a le face à face, il y a la rencontre, il y a le cœur à cœur, là où l’on ne triche pas, là où l’on ne se cache pas, là où l'on est nu, tant aimé, tant gracié et libre.
Et il est bon, frères et sœurs, de prier avec et pour nos fidèles défunts. Et il est bon de dire avec saint Jean de la Croix : « Au soir de notre vie, nous serons jugés sur l'amour. » Et il est bon aussi de prier avec nos fidèles défunts et pour eux. Il paraît que Polnareff chantait : « On ira tous au Paradis ». Ce n'est pas le théologien le plus redoutable que la France ait pu faire !
Mais, même si ce n'est pas faux, qu'est-ce que l'Église enseigne ? Au soir de notre vie, nous serons jugés sur l'amour.
Prier pour nos défunts ce n'est pas facultatif. J'aime définir le Purgatoire comme le Salon de beauté du Ciel. « La machine à laver du Ciel ». Et un salon de beauté, c'est un endroit où l’on n'a pas peur parce qu'on se sent estimé, pris en main. Le salon de beauté, c'est un lieu où l’on se refait une beauté intérieure pour être ensuite, gracié, « miséricordié », pardonné par le Seigneur.
Car il faut qu'il y ait un moment particulier de purification avant le face-à-face du Ciel parce que nous ne sommes pas « nickel » ! (Ô mon Dieu, qui d'entre nous est nickel ?) Il faut que nous puissions entrer paisiblement à la table des Noces de l'Agneau, là où sont les âmes de nos fidèles défunts.
Voyez, à vue humaine, tout cela est inatteignable. A vue humaine, tout cela paraît déraisonnable. A vue humaine, le Père Marivin prêche dans le désert.
Mais nous croyons !
- Puisque Le Christ est ressuscité,
- puisqu'il est revenu d'entre les morts,
- puisque les apôtres sont allés, au mépris de leur vie annoncer la bonne nouvelle,
- puisque le livre de la sagesse nous dit que « les âmes des justes sont dans les mains de Dieu »,
- puisque le psaume nous dit, « espère, sois fort et prends courage »,
- puisque Saint Jean nous dit par la bouche de Jésus : « Tout ce que le père me donne, je ne vais pas le jeter dehors » !
Oui, nous croyons !
Alors, Frères et sœurs, la mort n'est pas une rupture, mais un passage. La mort n'est pas une impasse, mais un lieu de communion. Terre et cieux dansent de joie allègrement !
Mes amis, je sais, pour certains, la peine que vous avez d'être ici. Je sais, pour certains, le scandale de la mort de votre enfant. Et je le partage. Je sais, pour certains, combien est grande la douleur de perdre une mère et pour d'autres aussi, le décès d'un parent âgé reste parfois difficile.
Délicatesse, espérance.
Mais, si nous savions combien celles et ceux qui nous ont quittés, une fois purifiés, sont dans la paix ! Ils voient, ils contemplent, ils savourent, et ils intercèdent, et ils prient pour nous. Et ils chantent avec Sainte Thérèse : « Je ne meurs pas, j'entre dans la vie, et je passerai mon ciel à faire du bien sur la terre. »
Pourquoi croyez-vous que je tienne autant à ce que notre paroisse célèbre dignement ce qui me semble essentiel ? Pourquoi croyez-vous que dans mon ministère, avec des fidèles laïcs que je connais et qui donnent beaucoup de leur temps gratuitement, je pense qu'il est essentiel de bien célébrer les obsèques ? Dans un monde laïcisé, dans un monde sécularisé, il est essentiel d’accueillir chacun, sans jamais mettre une étiquette. Et cette année, nous avons tenté d'accueillir tous et chacun, écouter, comprendre, cheminer, accompagner, donner à voir l'espérance et parler du ciel. Notre monde a besoin qu'on lui parle du Ciel. Notre monde a besoin qu'on lui parle du sens de la vie. Notre monde a besoin plus que jamais de Jésus, parce qu’il est un monde sans Dieu et qu’il se croit immortel.
Pas d'intelligence artificielle pour gérer les peines et les deuils ! Mais l'intelligence du cœur et de la communion des saints. Nous savons que nous sommes pèlerins de passage sur cette terre, mais nous savons aussi que la mort n'a pas le dernier mot, même quand elle est incompréhensible.
Et je voudrai ajouter encore un mot pour vous dire combien il est important de faire célébrer des messes pour les défunts. Pas pour faire plaisir au curé ! Si nous croyons que les âmes de nos fidèles défunts sont près de Jésus, à la Table des Noces de l'Agneau, si, en pèlerins sur cette terre, nous venons nous approcher du Corps du Christ ressuscité, l'Agneau de Dieu qui enlève les péchés du monde, celui que saint Carlo Acutis a annoncé sur Internet, alors, en venant communier, nous nous approchons spirituellement de nos fidèles défunts.
Frères et sœurs, Ne cherchez pas dans les vestiges du passé celui ou celle qui vous a quittés. Ne soyez pas trop nostalgiques. Ne regardez pas trop en arrière. Quant à moi, il y a une question essentielle que je me pose : qu’auraient voulu ceux qui nous ont quittés. S'ils sont vivants, qu'est-ce qu'ils nous disent depuis le balcon du ciel ? « Ma fille, mon enfant, maman, papa, espérez, restez debout et venez communier, si vous vous en sentez aptes. Venez communier, approchez-vous de Jésus. » C'est ça le mystère de la foi. C'est ça la communion des saints, et c'est cela notre espérance chrétienne, frères et sœurs. Nul et personne ne nous l'enlèvera.
Christ est ressuscité et l'espérance ne déçoit jamais. Mon Dieu, à vue humaine, c'est totalement décalé, mais avec le Seigneur, la grâce nous suffit.
Frères et sœurs, après les fêtes de la Toussaint, hier, n'hésitons pas à "tarabuster" nos fidèles défunts. Voyez, hier sur la tombe de mes grands-parents, dans le petit cimetière de Callac-Plumelec, j'ai prié sur la tombe de mes grands-parents que j'aimais beaucoup et que je continue à aimer dans la foi. Près de mes grands-parents, près de mon oncle, j'ai déposé mes intentions. Je leur ai demandé leur aide, parce que je suis intimement persuadé qu'après l'épreuve de la séparation, ils intercèdent et ils prient pour moi et ils prient pour nous.
C'est le lieu de ma joie. C'est le lieu de mon espérance, c'est le lieu de mon combat, c'est le lieu « du déjà là et du pas encore », et c'est le lieu de la Vérité qui rend libre.
Frères et sœurs, vivez de l'espérance. Ne profitez pas, goûtez et savourez l'existence. On ne sait ni le jour ni l'heure, mais on sait que c'est toi, Seigneur. Et je vous demande une seule chose, à travers vos vies, n'oubliez pas que le Ciel est en vous depuis votre baptême. Naissance, renaissance, ENCIELEMENT. Et n'hésitons pas à parler du Ciel.
Et dernière chose, elle est plus délicate. N'oubliez pas, quand quelqu'un de votre famille décède, c'est bien d'offrir des fleurs. J'ai vu des fleurs sur la tombe de mes grands-parents. C'est essentiel, c'est humain. Ça dit l'amour. Mais n'oubliez pas qu’il y a une autre manière de leur dire votre amour, c’est de leur offrir des messes. Pas pour le business commercial d'une église envers les défunts ! Mais dans la gratuité de l'amour de Dieu, de la miséricorde, le plus beau cadeau que l'on puisse faire quand on est chrétien à son défunt, c'est qu'il puisse être lié au sacrement de l’eucharistie et qu'il puisse avec son Seigneur, intercéder pour nous, pour être purifié s'il y a besoin.
Belle et sainte fête des défunts.
N'oubliez jamais. Un jour vous le reverrez, alors ce sera la joie parfaite. Ne redoutez pas le moment où chacun d'entre nous aura à vivre ce face à face. » Je sais que mon libérateur est vivant ». Amen.
P. Patrice MARIVIN