Homélie du Jour de Noël 2023

 « Le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous » !

Dieu s’est fait « homme » c’est-à-dire semblable aux humains ! Ce n’est pas un évènement banal, ordinaire, mais prodigieux !

Le père Teilhard de Chardin qui avait longuement médité sur le mystère de Noël, disait ceci :

Par son Incarnation, le Christ, s’est inséré dans le monde comme un élément du monde  qui n’est plus séparable de la croissance du monde, tellement incrusté dans le monde visible qu’on ne saurait plus l’en arracher désormais qu’en ébranlant les fondements mêmes de l’univers. » L’incarnation est donc d’abord une incorporation de Dieu à la réalité du monde.

C’est un mystère insondable qu’il nous faut méditer sans cesse !

C’est une des originalités de la foi chrétienne que de croire en ce beau mystère de l’incarnation !

Hier soir, les textes de la Parole de Dieu nous proposaient de contempler un nouveau-né, un tout petit, entouré de ses parents, dans la grande sobriété d’une étable ! Mais tout était porté par cette grande joie du ciel qui éclatait en chant de louange du chœur des anges !

Ce matin, nous avons des textes plus « réfléchis » : que s’est-il passé cette nuit-là ? Qu’est-ce-qui est en jeu à travers la Nativité ?

Et l’Evangéliste Jean répond à ces questions : il parle tout d’abord du Verbe de Dieu. Il nous dit : « Par lui, tout est venu à l’existence et rien ne s’est fait sans lui » et il ajoute : « en lui était la vie ». Et il dit encore : « Le Verbe était la vraie lumière qui éclaire tout homme » !

Notre Dieu assume notre chair. Il assume notre condition humaine, nos fragilités. Il accepte de s’immerger dans notre monde violent, d’être victime du mal que nous commettons, pour manifester sa puissance d’amour à tous.

Nous croyons que la Création est bonne. Certes, elle est entachée par nos multiples fautes et a besoin d’être réparée, pardonnée, pour être sauvée. Mais elle ne peut pas être sauvée toute seule, c’est pourquoi, le don que Dieu nous fait de son fils, en lui donnant de naître parmi nous, est saisissant.

Le langage de l’Eglise, qui ne parle plus vraiment à nos contemporains (!), répète à l’envi que cet homme-là, Jésus, vient nous sauver. Mais de quoi ? Pourrions-nous, ici, en ce jour de Noël, tenter d’y réfléchir quelques instants ?

S’il nous sauve, c’est de la désespérance, du manque de foi en nous, en l’autre, en l’aujourd’hui, en l’avenir !

S’il nous sauve, c’est du trop peu de confiance en la vie, en Lui, en Sa présence. De notre indifférence, de nos enfermements, de nos myopies, de nos surdités, de la sclérose du cœur qui nous empêche de vivre !

S’il nous sauve, c’est de la peur qui colle au ventre, de la crainte d’un Dieu qui voudrait nous faire payer le droit de vivre ; de cette angoisse qui paralyse et fait, des mal-croyants que nous sommes, trop souvent des rampants !

S’il sauve, c’est de cette image tenace qui voudrait nous faire croire que Dieu attend des sacrifices comme un droit de passage, et qui fait de la vie spirituelle un impôt à payer.

S’il nous libère, c’est de ces certitudes dans lesquelles nous l’avons enfermé. C’est de nos catéchèses labelisées, de nos formules magiques et de ces petits rites qui quelques fois frôlent la névrose !

S’il nous libère, c’est de la religion qui légitime tant de pouvoirs et tant d’emprises. C’est de la culpabilité qui cancérise l’existence et empêche de vivre, de danser et d’aimer.

De Jésus, à NOEL, nous apprenons qu’il n’y a pas de vie plus humaine qu’une vie donnée et disponible à ce qui vient. Il la transforme de l’intérieur.

De Jésus, à NOEL, nous apprenons à être des serviteurs et non des maîtres, à devenir responsable de nous-même et des autres et non à les charger de fardeaux. Nous apprenons de lui à rendre d’autres libres au lieu de les aliéner. A vivre simple, à assumer l’existence telle qu’elle est et à donner de la joie.

De Jésus, à NOEL, nous apprenons la valeur du silence et la présence consentie aux évènements et aux rencontres de la vie.

Le silence ! le précieux et fragile silence indispensable à notre vie chrétienne… Le murmure d’une brise légère. Son silence est pourtant une Parole : Dieu est là ! Dieu se montre ! Dieu parle !

Enfin, que dire encore, sur « Le Verbe fait Chair » ?   

• Jésus se tient toujours là où la vie Le conduit. Pas ailleurs. Pas en nostalgie. Pas dans l’imaginaire. Là. Pleinement là. Offert. Exposé. Livré. Rompu. Présent à celles et ceux qui sont sur son Chemin. Stable.
• Jésus est obéissant. Jamais contraint. Pas asservi et pas soumis. Le cœur et l’esprit grand ouverts. Il écoute la vie et se tient disponible.
• Jésus est pauvre. Il fait le choix de la simplicité mais pas celui de la misère. Cela Le rend plus libre pour rencontrer, rendre d’autres plus vivants.
• Jésus aime d’un amour qui ne dévore pas, sans avarice de lui-même. Sans mesquinerie. En vérité. Joyeusement !

            « Le Verbe s’est fait Chair et il a demeuré parmi nous ! »

            Croire que ce qui arrive est une PROMESSE ! Partir, repartir encore ! Ne pas se replier. Nous mettre ensemble en ce beau chemin de liberté et de paix. AMEN.  

P. Patrice Marivin