Homélie 6ème dimanche de Pâques (A)
Les 3 lectures de ce dimanche se complètent admirablement pour nous mettre devant les yeux le parcours d’un disciple missionnaire. Aujourd’hui, celui qui nous sert d’exemple c’est Philippe. Souvenez-vous, dimanche dernier, il faisait partie de ces 7 hommes choisis par les apôtres pour devenir les premiers diacres. Et le récit se terminait par la liesse de voir que : « le nombre des disciples se multipliait fortement à Jérusalem, et une grande foule de prêtres juifs parvenaient à l’obéissance de la foi[1] ». On pourrait penser que c’est poussé par cet élan missionnaire positif que Philippe part annoncer la Bonne Nouvelle en Samarie où nous le retrouvons aujourd’hui. Pas du tout ! Peu après l’appel des diacres, Étienne est mis à mort et une violente persécution éclate contre l’Église de Jérusalem. Philippe, comme la majorité des chrétiens, est donc en train de fuir Jérusalem pour échapper à la persécution. On est loin d’une mission d’évangélisation bien ficelée !
Pourtant Philippe se retrouve à prêcher la bonne nouvelle sur cette terre de Samarie. Qu’a-t-il bien pu se passer pour que la situation se renverse à ce point ?
La réponse nous est donnée par la deuxième lecture de ce jour : « Soyez prêts à tout moment à présenter une défense devant quiconque vous demande de rendre raison de l’espérance qui est en vous[2] ». Si le scout doit être « toujours prêt » à rendre service, le chrétien doit être toujours prêt à découvrir aux autres ce qui l’anime au fond de son cœur. C’est ce que fait Philippe ; il a cette attention à l’Esprit-Saint qui lui permet de comprendre que c’est le bon moment pour proclamer cette espérance qui est en lui. Et il le fait avec douceur et respect comme c’est précisé dans l’épître de Saint Pierre.
Qu’est-ce que cela nous apprend pour notre vie aujourd’hui ?
- Tout d’abord, que le Seigneur se sert de tout pour donner l’occasion de répandre son Évangile. Philippe part pour sauver sa vie, pour fuir une persécution et grâce à cette mise en route, il se retrouve en contact avec des personnes qui n’ont pas encore eu accès à la Révélation du Christ. Cela peut nous éclairer lorsqu’une épreuve, une maladie, un changement profond dans notre vie nous déstabilise et nous éloigne de nos sécurités. Nous pouvons vivre ces épreuves avec la force que donne la foi en ayant cette conviction profonde que l’Esprit-Saint peut permettre une rencontre qui n’aurait jamais pu avoir lieu autrement. Dieu aime passer par les chemins les plus ordinaires de notre vie pour se rendre visible.
- Ensuite, cet exemple de Philippe nous apprend à cultiver notre Espérance. Si nous ne nourrissons pas régulièrement par la prière personnelle et par la lecture de la Parole de Dieu l’Espérance qui est en nous, alors qu’allons-nous dire à ceux qui nous questionnent ? Être en capacité de rendre compte de ce qui nous habite suppose que nous prenions le temps de formuler avec des mots simples cette foi qui nous fait vivre.
- Enfin, cette expérience de Philippe nous montre la manière avec laquelle nous devons témoigner de notre espérance : avec douceur et respect. Ce n’est pas toujours évident de garder son sang-froid lorsqu’on subit des moqueries à cause de notre foi. Ce n’est pas toujours évident de rester en paix lorsqu’on a l’impression d’assister à la destruction d’une société que des générations de chrétiens ont édifiée au fil des siècles. Alors d’où peuvent venir cette douceur et ce respect qui sont nos seules armes ?
Nous trouvons la réponse grâce à l’Évangile de ce jour : « [le Père] vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous[3] ». Si nous avons un défenseur, alors nous n’avons pas besoin d’être sur la défensive. Si nous avons suffisamment confiance en l’Esprit Saint alors nous pouvons rester dans cette attitude de respect et de douceur car c’est lui qui combat pour nous.
Être disciple missionnaire aujourd’hui c’est nourrir l’Espérance qui nous fait vivre, pour oser en témoigner là où les circonstances de nos vies nous entraînent. Et ce témoignage, pour être fécond ne peut se faire que dans la douceur et le respect.
Demandons la grâce, durant ces jours qui nous séparent de la Pentecôte, d’être attentif aux appels de l’Esprit dans notre vie et d’avoir le courage d’y répondre joyeusement et totalement. Amen.
[1] Ac 6, 7.
[2] 1 P 3, 15.
[3] Jn 14, 15.