Homélie du 29 septembre 2024

26è dimanche du Temps ordinaire B - Week-end Saint Vincent de Paul

Homélie dialoguée entre le Père Patrice et Nicole, membre de la Conférence St Vincent de Paul.
Transcription écrite de l'homélie prononcée lors de la messe de 11 heures.

Chacun d'entre nous a peut-être en tête une date importante pour lui ou pour elle : un anniversaire, une rencontre avec un ami ou la bien-aimée, la naissance de son premier enfant, le décès de l'un de ses parents, l'arrivée d'un nouvel emploi et que sais-je encore ?

Saint Vincent de Paul, après plusieurs années de ministère dans une France tourmentée du début du 17e siècle, nous dira toujours l'importance de la date du 24 janvier 1617. Nous l'avons dit, il est prêtre depuis plusieurs années.

Alors que vit il ?

Il vit un moment de déprime dans sa vie et son ministère. « Je ne dormais plus, je ne priais plus, je ne catéchisais plus, je ne prêchais plus. »

Alors qu'il est dans cet état d'esprit, il est appelé par une dame de compagnie à aller confesser une personne précaire et pauvre. C'est en rencontrant et en confessant une personne précaire et pauvre que Saint Vincent de Paul va se convertir à nouveau au Seigneur.

Une confession générale, et Vincent de Paul repart sur les routes de son ministère ! Les pauvres sont nos maîtres, alors a priori on peut juger condamner … se dire « il a bu, il est fatigué et il aime venir se mettre en scène ici souvent à la cathédrale » ... çà c'est ce que l'on voit, mais ce que l'on ne voit pas c'est peut être la misère, la blessure, la fêlure.

Les pauvres ce sont nos maîtres, ce n'est pas une déclaration affective ou idéologique, c'est une affirmation théologique.

Mais dites-moi, c'est qui, c'est quoi une personne pauvre ? Ce n'est pas forcément une personne à la rue.

(Celui qu'on vient d'apercevoir à l'instant, il a de l'argent. Ce n'est pas forcément quelqu'un qui n'a pas de logement, celui qu'on vient d'apercevoir à l'instant, il en a un.)

Une personne pauvre, ça peut être une personne coupée de toute relation affective, humaine ou spirituelle, voire même sociale.

Et Saint Vincent de Paul n'est pas d'abord un humanitaire au sens moderne du terme, il se situait autrement.

• Plus il se donne à son Seigneur, plus il se donne aux pauvres  ;
• et plus il se donne aux pauvres, plus il rencontre son Seigneur.

Et Vincent de Paul dira « donnez-moi un homme d'oraison, il sera capable de tout ! »

Ce que vous remarquez, c’est combien le service des personnes pauvres demande de la délicatesse, de l'exigence et parfois, indépendamment de nous, accompagner des personnes qui se servent d'un système français tellement généreux. Il y en a qui abusent, il y a des personnes qui abusent d'un système, il faut le dire, grandement aidant en France. Et la vraie charité, c'est la vérité, la vérité qui, par delà des apparences, permet de rejoindre les fêlures, les blessures, sans pour autant réduire le service du pauvre à des techniques ou des procédures. Les pauvres ce sont toujours des personnes dans une histoire simple, dans une histoire du salut. Nous leur devons persévérance, patience, exigence, apparence, réalité, blessure.

Jean-Paul 2 disait un jour, « Je vous invite sans cesse à revenir à la source de la vie qu'est le Christ pour inventer les moyens de servir vos frères. » Et je crois qu'il le disait en pensant un peu à la vie de Vincent de Paul.

J'aimerais maintenant dans la 2ème partie de l’homélie dialoguer avec Nicole.

• Nicole est membre de la Conférence Saint Vincent de Paul de la paroisse et en dialoguant avec Nicole, lui poser quelques questions :

Père Marivin : Nicole comment la Conférence Saint Vincent de Paul de la cathédrale peut-elle partager les maigres richesses qu'elle possède ?

L'apôtre Jacques, invitait les chrétiens à mettre en œuvre la charité que leur inspirait l'esprit Saint. C'est ainsi que dans la joie de notre baptême, nous suivons le chemin initié par Frédéric Ozanam qui était d'accord avec Saint-Jacques. « Pas de foi sans charité. »

Et et c'est bien à ce titre qu'il fut l'inspirateur de la de la Doctrine sociale de l'Église. Nos richesses s'accroissent au fil de nos rencontres avec les plus précaires, à travers l'accueil, le service, le respect, le regard fraternel et surtout des relations authentiques avec les accueillis.

Père Marivin : Si on est plus pratique au plus proche du réel. Quelles sont vos vos œuvres au quotidien ?

Nous recevons individuellement tous les jours dans nos locaux. Les personnes qui ont besoin d'aide son jugement sur leur parcours de vie, nous les écoutons et les mettons en relation avec des organismes ou des professionnels compétents. Nous les aidons parfois à voir clair dans leurs soucis administratifs, et Dieu sait s'ils en ont ! et proposons beaucoup d'autres actions qui, si petites soient elles, permettent de remettre de la lumière et de l'humain dans leur vie et dans la notre.

Père Marivin : Mais qu'en est-il de ses richesses matérielles, si nécessaires aussi dans la pauvreté ?

L'aide matérielle que nous leur fournissons provient de dons et permet de proposer :

• l'accueil du petit déjeuner tous les matins de la semaine,
• un repas chaud servi à table tous les jeudis,
• une maraude quotidienne,
• une distribution de produits d'hygiène,
• l'achat de duvets et de matelas pour les durs soir d'hiver (et l'automne commence vite),
• une aide à l'hébergement d'urgence.
• des visites à domicile pour pallier la solitude
• des aides financières à certaines familles de l'école de Sainte Jeanne d'Arc qui seraient dans le besoin.

Et puis aussi, Père, des ateliers récréatifs, plus légers, partagés dans la joie du « faire ensemble » et ça c'est important !  Et bien d'autres choses encore. Mais on ne va pas tout nommer ce matin.

Père Marivin : Alors dernière question à vous la chrétienne catholique engagée, Nicole. Comment le Christ transforme tout cela ? Quand on est croyant, pratiquant, comment, dans la rencontre avec le Christ, est-on amené à mieux faire la rencontre des personnes les plus vulnérables, les plus fragiles ?

Bien pour moi j'ai été sensible à l'appel du pape François qui nous a toujours invités à aller au-delà de nos frontières, à sortir de nos lieux habituels. Et j'avoue que ma retraite professionnelle m'a donné du temps. J'avais toujours eu cette idée de frapper à la porte de la société Saint Vincent de Paul et de découvrir davantage cette association. Et en rejoignant Saint Vincent de Paul, j'ai découvert une équipe paroissiale de personnes investies dans le service auprès des autres. Des personnes prêtes à l'accueil, une équipe très mobilisée et disponible aux personnes dans le besoin, aux personnes seules pour les visiter.

J'ai découvert une équipe de paroissiens soudés, qui prient ensemble avant chaque réunion et j'ai senti très vite la joie du service et de la fraternité.

Œuvrer avec d'autres m'engage dans une dynamique et donne du sens. Se mettre au service de l'autre, sans attendre de retour, c'est essentiel. Et c'est ma manière de répondre aujourd'hui à l'appel du Christ. Et c'est une vraie richesse pour moi. Celle d'ailleurs que nous propose aujourd'hui la lecture de l'Épître de Saint Jacques ?

Père Marivin : Merci Nicole !

« En s'approchant de l'autre, l'amour se préoccupe de l'autre »

Frères et sœurs, en enfants de Dieu, conscients de nos propres fragilités, de nos propres pauvretés, de nos propres faiblesses, (sans jeter l’oppobre sur qui que ce soit), ouvrons nos coeurs à la joie du service et de la fraternité  ; engageons-nous  ensemble, en communauté, dans la charité avec le Christ.

Et je crois qu’ici, en cœur de ville, nous avons beaucoup à discerner sur les nouvelles pauvretés. Elles ne sont peut être pas en premier du côté de l'argent, du côté de l'habit, mais elles sont peut être du côté d'un grand isolement.

Je vous l'ai dit :  isolement humain, affectif ou spirituel. Trop de personnes sont encore seules ici, près de nous. Nous laisser convertir, nous laisser rejoindre dans un véritable amour ! « Je vous invite sans cesse à revenir à la source de la vie qu'est le Christ pour inventer les moyens de servir vos frères. »

Amour et vérité se rencontrent. Justice et paix s’embrassent. Amen.

 P. Patrice Marivin et Nicole Auger